5112 Minutes d’aventure – PTL 2019

Jules-henri gabioud • déc. 22, 2019

Au sujet de la PTL

Pour une petite trotte, ce fut une sacrée trotte à parcourir cols, montagnes et refuges durant ce tour du Mont-Blanc élargi.

Ce n’est pas une course mais une aventure où la seule personne sur qui tu peux compter est ton coéquipier et la seule chose à faire est de mettre un pied devant l’autre, mais sans trébucher, tellement la montagne est sublime et tellement la fatigue permanente.

Et la PTL, c’est en équipe aussi, car, à deux on ne va pas plus vite, mais on va surtout plus loin. Seul on franchit un col, en cordée on traverse un massif ! En solo, un coup de moins bien te sera fatal, en équipe, on les surmontera tous.

Pour le coup, mon équipier était tout trouvé avec mon frère, Candide, sur sa lancée de faire toutes les courses de l’UTMB. OCC15, CCC16, TDS17, UTMB18, cela ne pouvait être que PTL19. Désolé pour ce langage codé que seuls trailers et bénévoles peuvent décoder, mais, ça fait partie du tout.

Oui, la PTL fut une aventure où le dossard n’est qu’un simple bout de papier flottant au vent tel, un petit drapeau de prières. Il te rappelle aussi pourquoi tu es là : réaliser un défi ? te surpasser ? toucher tes limites et fabriquer des souvenirs pour la vie ?

Sur le papier, ça fait vachement peur cette histoire avec ses 25’000 m+ et ses 290 km. Pas après pas, souffle après souffle, ça peut le faire.


Alors, on embarque ?

Chamonix, l’église, c’est ici que toute cette histoire d’amour avec le trail commença 12 ans plus tôt après une soirée, et en plus, en tête à tête avec la nature mais aussi avec l’endurance. Pourquoi ne pas refermer ce livre, mon histoire avec le trail par la plus belle aventure qui soit, la PTL ?

Balise enclenchée, mollets affutés, sacs ajustés, c’est parti dans les ruelles de Chamonix mais plutôt tranquille, histoire de s’échauffer un peu et croiser quelques amis. Départ tout simple, sans fioriture mais plein d’émotion ! Chamonix se réveille !

Candide et moi nous échappons, après tout, autant faire du chemin tant que ça va. Il y en aura assez de coups de mou plus tard. Ces premiers kilomètres passent finalement assez bien et nous sommes contents de quitter les Houches pour partir à l’assaut de la belle montagne avec l’ascension du col des Rognes. Candide a vraiment une belle forme et je dois m’accrocher un peu… Nous en profitons aussi pour papoter durant la montée et se caler sur un bon rythme. En dessous de nous, nous remarquons que les espagnols et les frangins Trivel ne sont pas si loin, alors que le pierrier au-dessus de col du Mont-Lachat approche. Le pas est bon, nous enfilons notre casque sous ce col afin de franchir le pierrier, puis nous atteignons l’échelle signalant la fin du col. Un petit écart est creusé mais peu importe, notre rythme n’est pas si mal et la vue ici est grandiose.

Le col Tricot est assez rapidement avalé et nous sommes impatients de boire un coup à Miage. Nous en profiterons également pour déguster une tarte aux myrtilles. (Pour le guide culinaire des refuges de la PTL, écrivez-moi !)
Cette pause nous requinque. En repartant on distingue les frangins Trivel juste derrière nous. Il nous faut 10 minutes pour digérer et arriver au chalet du Truc pour reprendre notre allure. Cette pause nous donne un regain d’énergie et la traversée / montée au refuge de Tré la Tête n’est pas encore trop longue. Nouvelle pause boissons, les gardiens sont surpris de nous voir déjà ici. Nous poursuivons ensuite notre bambée via la Balme avec, encore une pause sirop, puis le col d’Enclave. Cette magnifique ascension nous conduit dans le pierrier avec vue plongeante sur les lacs Jovet.
Nous jetons un œil en arrière et apercevons les frangins Trivel un peu en-dessous. Pas le temps de basculer qu’il faut remonter au col de la Grande Ecaille avant une bonne descente au refuge des Mottets pour… manger un morceau.
Quel plaisir de voir ici les bénévoles et de parler un peu tout en dégustant l’excellent repas. Nous prenons notre temps et les Trivel arrivent peu après nous. Nous décidons ensuite de repartir à quatre. Pour moi, la digestion est plutôt compliquée mais la montée au col de la Seigne se fait sous une lumière fantastique… Tout en admirant ce beau spectacle, nous profitons de ce moment pour papoter avec les frangins Tivel et partager nos aventures trail.

Pour être franc, ces diots (saucissons savoyards) nous donnent du job et nous n’arrivons pas dans notre meilleure forme au col. Il est temps donc de se couvrir et d’attendre que ça passe. Nous laissons un peu d’avance aux Trivel et continuons notre périple via le col Chavannes puis les crêtes du Mont Fortin. La fin de journée est belle et les lumières sont justes incroyables. Ici nous sommes seuls au monde et la montagne est juste partagée entre deux équipes de frangins.
La magie de la nuit arrive, il est temps de sortir frontale, le coupe vent sur cette traverse en crête. Nous nous sentons mieux , l’énergie est à nouveau là. Nous profitons de cette forme pour recoller aux frangins Trivel au col de l’Arp. Nous avions reconnu cette partie hors sentier peu agréable, Candide trace la route droit dans la pente dans le bon couloir. Puis nous retrouvons Alberto sous la Tête des Vieux. Nous profitons de ce moment pour admirer les lumières de Courmayeur.
Faut-il être un peu dingue pour passer sa nuit au cœur des Alpes ? Mais oui, et en plus nous prenons du plaisir, ici, comme un peu détaché de ce monde comme sur une autre planète.
Nous continuons notre balade à quatre sur cette crête un peu délicate avant de retrouver le sentier dans les alpages. Tout va assez bien pour Candide et moi, les frangins Trivrel, descendent plus lentement que nous sur Pré-St-Didier; nous en profitons pour prendre un peu d’avance en vue d’un petit dodo à Morgex au km 83.

00 : 11, base vie de Morgex, nous sommes contents d’y arriver et nous y retrouvons les amis Elena, Mimmo, Loris et les bénévoles PTL. Douche, change total et dodo de 45min, les frangins Trivent arrivent 10 minutes après nous. Pas facile le dodo car nous soupçonnons un gros ronfleur dans les Trivel.
Départ de Morgex vers 2heures du matin, encore un peu endormis mais assez lucides. Cette partie est un peu moins montagne, moins intéressante et la traverse sur Vedun se fait en compagnie des frangins Trivel. Ce trançon est un peu monotone mais j’apprécie de pouvoir être à quatre. Toutefois, nous nous réjouissons du retour du jour.
Plus tard, la fatigue se fait sentir ; Candide et moi décidons de nous poser 5 petites minutes chrono pour un petit som’. Le soleil se lève et je n’ai plus de force, chaque pas vers le col de la Paletta est difficile et je vis vraiment un moment difficile. La montée vers le col est dur et je souffre. Tout me tombe dessus, mal aux jambes, sommeil, fatigue, j’ai l’impression que nous n’y arriverons jamais. Candide m’encourage mais je ne dis pas un mot; j’acquiesce juste de la tête. Puis, le temps passe, nous avons tout de même avancé et le col puis puis le refuge Fallère sont visibles. En contrebas, nous distingons les Trivel sur la terrasse.
Je suis mal et j’ai besoin d’une pause alors nous profitons pour dormir à l’arrache dans le refuge. Nous devons toutefois souligner que le gardien, nous attendait pour 17 heures ! Il est 8heures du matin…
Pour couronner le tout, mon petit-déjeuner ressort, encore plus vite qu’il est entré dans mon estomac. Me voici au plus mal, Candide me regarde tout désolé. Flûte, ça me joue encore des tours et je suis dépité. Stop ou encore ?

Mieux vaut s’en aller mais le sommet du Mont-Fallère parait tellement haut que ça sera difficile. Pas après pas, mètre après mètre nous grimpons vers cette montagne au panorama fantastique. Arrivé au sommet, je ferme les yeux 1 minute et Candide en profite pour signer le livre du sommet comme ultime souvenir de notre PTL. A coup de coca, cela commence à donner le tour et la terrible descente du vallon de Flassin sur la route passe encore assez bien. Vivement l’arrivée à Etroubles pour changer de balise et tenter de mettre quelque chose dans mon estomac vide. Candide est bien et fait les courses avant une petite pause chips au cœur du village. Ici c’est un peu comme chez nous et c’est bien d’être là. pour un moment de calme.
La montée au col Champillon fut extrêmement longue, interminable, infinie pour moi. Je suis collé au chemin, lent, mou, lourd. Candide me propose même d’échanger nos sacs sur cette portion. Le col est finalement enfin là et nous savons que le refuge Champillon est à quelques 10 minutes en contrebas, quel soulagement !
Ici, nous retrouvons des bénévoles mais aussi un succulent repas préparé par le refuge. Viande séchée, fromage, polenta, nous voici un peu requinqués. Mais, nous ne tardons pas trop et la descente est rondement menée. Petit détours à Glassier pour boire un coup avant d’attaquer cette grosse ascension sur By pour plus de 1500 m+. Nous retrouvons un peu de rythme et la température est parfaite pour cette longue ascension, la dernière déjà en Italie.

Nous voici au refuge Chiarella avant la nuit, près du poêle et mangeant un morceau. Malgré le temps maussade, pluie et brouillard, le moral est bon et nous repartons en direction de Chanrion. On ne voit pas à 5 mètres avant le col de By et je prends le GPS pour la première fois pour assurer le coup. On cherche les cairns fabriqués 10 jours auparavant par Gigi avant d’atteindre le col où nous sommes surpris de ne voir personne.
On enfile les crampons et entamons la descente en plein brouillard avant de distinguer la lampe de Corrado, le guide de la PTL. Les étoiles ne sont pas dans le ciel mais elles sont juste devant nous sur le glacier nous signalant ainsi la voie à suivre. Plus bas, On retrouve Corrado qui nous aide à enfiler le baudrier et le slalom à travers les crevasses est rapidement effectué. Il pleut bien et ce n’est pas très agréable mais le balisage nous permet d’avancer confortablement. C’est ok avec le glacier mais un cimetière de pierres et de roches nous attend et tout est ici détrempé.
Il faut une concentration extrême et je guide Candide afin de rester sur la trace GPS pour retrouver les fameux points jaunes sur les rochers. Au loin, nous distinguons les lumières de la cabane qui ne semble pas très proche. Encore un petit effort et nous voici autour des 23h à la cabane Chanrion où les gardiens Célien et René nous concoctent un bon petit plat. Nous échangeons nos places avec les Trivel. Ils repartent et nous arrivons. Une heure de sommeil est bienvenue. Nous sommes Suisse, au chaud, et ma fois ça va encore assez bien !

Repos de courte durée et nous voici embarqués dans une nouvelle nuit à longer l’immensité du Val de Bagnes. Cette nuit est sombre la traversée est longue du côté de Tsofeiret. L’unique lumière visible se trouve très loin au niveau du barrage. En levant les yeux, deux petites étoiles grimpent au loin ; ce sont les lampes des frères Trivel dans la région des écuries du Crêt.
Mauvoisin, le barrage, enfin ! Il nous faut fermer un instant les yeux et nous voici lancés à l’assaut des écuries en voûtes du Vasevay. Nous avons encore un rythme acceptable, mais il n’est pas facile de se tenir éveillés durant cette 2
ème nuit. Nous décidons donc de faire un nouveau micro-sommeil de 5 minutes sur le plancher des écuries du Crêt. Encore un petit effort pour le Col de Sarshlau, où nous retrouvons enfin la lueur du jour et une nouvelle énergie pour arriver à la cabane Louvie. Là, une petite pause est bienvenue.
Après une petite pause dodo bien nécessaire, quelques tartines sont les bienvenues. Puis, nous reprenons le chemin en direction du cœur de ce Val de Bagnes, mais sans le road-book oublié au refuge. C’est sans compter sur l’aide-gardienne, Amélie, qui nous rattrape au pas de course sous le col Termin. Super esprit PTL et merci à elle pour son aide ! Allez, encore une petite pause café, chips à la cabane Mont-Fort et nous croquons chips après chips, euh non plutôt petit à petit ce Val de Bagnes. Col du Creblet, Col des Mines, Tête des Etablons passent bien et, nous nous connaissons bien le coin.
Emma et Albane se promènent du côté de la Croix de Cœur. cela fait du bien de parler un peu de notre aventure. Encore un petit effort pour atteindre la Pierre Avoi, tout en donnant un coup d’œil à notre cher Val Ferret, juste en face. En avant pour une difficile descente de 2’000 m de dénivelés. Puis, jusqu’à Salanfe l’enchaînement va être colossal. C’est le spot PTL 2019, c’est ici qu’il faut être au top après 200 km !

Nous comptons les champignons en descendant : cette partie du parcours assez monotone mais après l’interminable toboggan, nous débouchons enfin à Charrat. Là place à une glace à l’eau, bien mértitée pour poursuivre tranquillement jusqu’à Fully et sa base vie avec, tout de même, 205 km au compteur ! Nous sommes contents d’y être et une bonne douche nous y attend.
Physiquement ça va, moralement aussi, nous apprenons que les frangins Trivel sont partis il n’y a pas si longtemps. Objectif le Grand Chavalard de jour ! Il va falloir abréger la pause et, après la douche, avaler une petite planchette valaisanne. Nous sommes ensuite en chemin pour la suite. Nous avons été heureux de rencontrer les amis et connaissances à Fully ; cela fut bien agréable de repartir plein d’énergie, cela grâce à vous. Dès maintenant, la donne est simple, 2500 m+ dans les dents, c’est énorme ! Mais nous y arriverons ! Objectif 20 heures à la croix sommitale.
De la patience, il en faudra pour ce véritable mur, partant de la plaine jusqu’au ciel. Nous trouvons très vite notre rythme calé sur un bon 750m/h jusqu’à Planuit où l’on croise Théo, un jeune coureur de Fully qui nous tiendra compagnie jusqu’aux Garettes. Là d’autres amis skieurs-alpinistes nous attendent. Il est temps de quitter le sommet du Kilomètre Vertical pour atteindre le replat de Sorniot. Pas par pas, nous avançons et nous avalons les mètres qui nous séparent du sommet.

Le ciel se charge et nous pressons un peu le pas avec l’objectif d’atteindre le sommet pour les ultimes moments de jour vers 20 heures, comme prévu. Nous sommes bien éveillés et profitons de nous hisser sur nos bras afin de franchir les paravalanches. En temps normal, l’exercice est facile, mais là… c’est différent. A nouveau, nous vivons un moment unique où les bouquetins sont ici nos seuls compagnons d’aventure et nous regardent avec curiosité. Allez, allez, la croix est juste au-dessus de cette crête et après un ultime effort à la force de nos bras mais aussi avec notre cœur nous débouchons sur ce Chavalard, petit Everest de cette PTL.
Wouah ! 20h02, quelle satisfaction ! Nous enfilons notre casque et poursuivons directement la traversée et la descente sur Fenestral. C’est une course contre la montre et chaque minute de jour compte, chaque minute de jour est une minute de gagnée car la nuit tombera et ralentira notre avancée. D’autant plus que du côté de Morcles le temps semble bien se couvrir.
La descente est bien sportive mais les cordes fraîchement installées facilitent grandement l’avancée et permettent de trouver son chemin aisément. Nous assurons le coup avec Candide en pesant bien chacun de nos pas. Quelques rochers se décrochent sous nos pas, mais nous parvenons au col du Basse juste au bon moment pour sortir les frontales. Le gros est passé et il nous reste un bon quart d’heure afin de glisser jusqu’à la cabane de Fenestral. Nous sommes soulagés d’avoir pu passer ce passage dans ces conditions. La cabane nous attend comme un havre de paix. Nous distinguons, une lampe 30 minutes au-dessus du refuge, c’est les frangins Trivel.

A la cabane, nous prenons notre temps. Nous en profitons aussi pour parler avec les bénévoles, Alberto et Beppe,après un bon repas. Après une petite sieste de 20 minutes, nous reprenons notre chemin avec les idées claires. Nous ne voulons pas trop tarder, une pause sera certainement utile à la cabane de la Tourche. L’allure est encore raisonnable en montant à la Dent de Morcles mais la pluie nous surprend avant le sommet et nous sommes obligés d’accélérer un peu. Heureusement, il ne fait pas froid mais le sol est détrempé et requiert encore plus d’attention et chaque pas doit être assuré.
Le passage de la boite aux lettres est plutôt sportif après 220 km et nous assurons au maximum la descente en se concentrant seulement sur le moment présent. Le sol est glissant et nous savons que nous devons nous méfier de ces millions de pierres entassées ici; elles sont prêtes à nous projeter dans le vide. Nous retrouvons l’abri militaire et il va falloir bientôt prendre la vire des Martinets afin de longer, longer et encore longer ce sentier jusqu’au col des Martinets puis jusqu’au col des Perris Blancs. C’est vraiement long! Mais quel spectacle de voir les lumières des villes au contrebas et quelle émotion incroyable d’être juste les deux, entre frères, sur les sommets, sur les crêtes, en pleine nuit, à réaliser, à assouvir ce rêve d’aventure comme deux petites étoiles perdues dans un ciel sans fin. Candide fatigue et perd patience alors que nous sommes dans la descente afin de rejoindre la Vire aux Bœufs puis la cabane de la Tourche que j’aperçois. Candide ne la voit pas, juste en-dessous de nous et ma fois, cela arrive, nous nous énervons ! Fatigue quand tu nous tiens…

Nous arrivons enfin à la cabane de la Tourche, merveilleusement bien accueillis par Karine la gardienne et … les frères Trivel qui reprennent leur chemin. Ils nous proposent de les accompagner. Malheureusement, avec l’énergie dépensée à Morcles, il nous faut un moment de repos pour bien affronter la suite et fin de cette PTL. Karine nous prépare une soupe tout en nous tenant compagnie, c’est très agréable de pouvoir parler. Nous apprenons avec tristesse que notre ami JeePee est arrêté du côté italien. Nous pensons à lui qui aime tellement ce lieu et à notre reco en commun de cette portion de parcours. Il est temps de fermer les yeux et de se laisser aller à rêver de Chamonix car oui on tient le bon bout de cette aventure.
Je verse totalement, mon sommeil est très profond jusqu’à ce que Candide me réveille. Je suis dans le dur et complètement ailleurs mais il nous faut repartir pour terminer et clore ce voyage. La descente sur Collonges se fait en semi-lucidité avant de retrouver un peu d’énergie le long de ce nouveau toboggan. On en a franchement marre, il est 4h du matin, nous sommes perdus dans cette forêt avec comme point de repère uniquement notre reco d’y il a 3 semaines auparavant…
Le village est mort, pas un chat, pas un bruit et nous en profitons pour faire n’importe quoi. 2 minutes assis sur la terrasse du café du village, 5 minutes à la fontaine pour finalement terminer par trouver un paquet de chips au distributeur de la gare d’Evionnaz. Sans oublier, l’arrêt cloque de Candide 5 minutes après. Ce n’est pas top et ça sent la grosse fatigue tout ça. Mais ça va, seulement 1’800 mètres de dénivelés positifs nous attendent pour le col du Jorat. Cela sera notre ultime chemin de croix de cette PTL, mais que ce fut dur !

Cette montée, c’est une grimpe terrible où les points de repères sont peu nombreux et je dis à Candide de tenir jusqu’à Cocorié car nous ne serons plus très loin du sommet sauf que le sentier est raide et monotone. Nous sommes à la limite, je tente d’encourager Candide et je regarde aussi mon altimètre qui semble figé. Nous sommes à bout, démotivé, exténué, au bout du rouleau mais nous ne lâcherons point !
On effectue quelques petites pauses avant de croiser un cueilleur de champignons dans la montée, nous avertissant de ne pas marcher sur les cèpes. Il y a ici des milliards de bolets et non, nous n’hallucinons pas. Ces bolets occupent un peu notre esprit et nous essayons de les compter pour occuper le temps, mais, sans succès. Un petit break au chalet de Cocorié et nous voici en route pour l’ultime partie en direction du col du Jorat. L’arrivée du jour nous donne quelques forces supplémentaires et l’espoir de venir à bout de cette ascension revient.
Pas après pas, on l’aura ce Jorat !!! La limite supérieure de la forêt est atteinte et nous grimpons sous un ciel d’un bleu magnifique avec un seul objectif, plonger en direction de Salanfe et son auberge. Le passage au col nous offre un nouveau décor et nous arrivons sur la dernière portion de cette PTL, qui nous conduira à Chamonix via Emosson. Une bonne tarte aux abricots et un grapefruit avalés, nous voici requinqués pour l’enchaînement col d’Emaney et col de Barberine.
Ça va bien, nous trottinons encore les plats et les descentes, le pas en montée, lui, est encore bien acceptable. A Barberine, nous nous accordons 3 minutes de micro-sieste à tout en appréciant ces paysages et pensant à cette aventure hors du commun.

Soudain une idée me traverse l’esprit, frites à Emosson? Allez en route, en voici un objectif intermédiaire intéressant. La descente en direction du lac d’Emosson est assez longue et la partie en bitume nous achève. Malgré cela, nous courrons encore, tout ça pour des frites. Emosson, nous sommes déphasés et c’est un retour sur terre, plutôt violent, avec tous ces touristes. Le menu enfant est parfait et les meilleures frites du monde sont avalées, avec comme accompagnement : une petite glace, le festin du 260ème kilomètre.
Nous checkons où sont les frangins Trivel, leur temps entre les points de contrôle pour avoir quelques repères. Nous calculons également notre heure potentielle d’arrivée ; autour de 22 heures cela semble être possible. Le col de la Terrasse est assez bien géré mais le temps se couvre derrière nous et il nous faut encore presser le pas pour atteindre rapidement les Chalets de La Loriaz après 40 minutes de descente.
Les ressources du corps humain sont incroyables et courir encore de cette manière nous procure une grande motivation pour le sprint final. Un arrêt rapide aux Chalets de La Loriaz car l’objectif à court terme est de passer les échelles de l’Aiguillette d’Argentière de jour.

La descente sur le Buet est assez rapidement effectuée avant de remonter au col des Montets pour une ultime pause café avant de rejoindre les coureurs de l’OCC. Nous prenons notre temps sur la terrasse du chalet de la réserve et en profitons pour discuter un peu de notre aventure. Il ne faut pas s’endormir, nous poursuivons notre route. Plus qu’une vallée à parcourir, la bonne, celle de l’Arve !
Nous laissons l’OCC à Tré le Champ pour reprendre notre ascension et 2 bénévoles sont surpris de nous voir prendre la direction opposée mais, nous, nous sommes sur la PTL! Nous retrouvons Emma dans la montée venue faire quelques photos et cela fait un bien fou de parler un peu. Les échelles, on les veut et on les attend de pied ferme, cela marquera notre ultime montée et changera un peu le rythme.
La fameuse Tête aux Vents se rapproche, superbe, nous offrant une fin de journée magnifique et, de surcroît, nous sommes seuls au monde à quelques encablures de Chamonix.
Seuls face au Mont-Blanc, comme 10 ans auparavant, à la fin de mon UTMB 2009, une magie que l’on vit mais que l’on ne peut décrire. C’est peut-être ça finalement la richesse d’une aventure, vivre des moments de communion avec la nature tout simplement et les garder au fond de soi. Pas le temps de pavoiser, il nous faut filer de jour à la Flégère. Chaque pose de pied sur un rocher me fait mal à cause d’une bonne ampoule mais pas le temps de desserrer les dents.

Sous la Flégère, nous retrouvons la foule de coureurs venant à bout de leur OCC. Certains nous encouragent en voyant notre dossard PTL et certains sont comme surpris de notre relative fraîcheur. Le ravitaillement est bondé et il ne faut pas tarder comme à chaque fois, ici, sur les hauts de Chamonix. Nous sortons nos frontales et nous engoufrons dans cette descente finale empruntée tellement de fois. Le rythme est bon et cela nous fait drôle d’être entourés de coureurs après 4 jours, quasi en solo, au cœur de ce massif du Mont-Blanc.
La nuit tombe pour donner une petite magie à cette fin d’aventure et nous nous félicitons simplement à l’entrée de Chamonix en laissant s’échapper quelques larmes. La boucle va être bouclée, cette PTL va se terminer, laissant une trace évidente, à vie, dans notre pratique de ce sport.
Qui aurait pensé que ce sport allait connaître une telle évolution et une telle popularité il y a 10 ans? Que de changements et d’engouement mais la PTL te ramène aux choses les plus simples de ce sport : partir du point A pour terminer au point B et tout le reste entre deux se joue avec tes jambes, ta tête mais avant tout ton cœur. Eu cœur, il en fallait un grand pour boucler cette PTL.
Les frangins Trivel sont là pour nous accueillir, nous donner gilets et cloches et, comme un petit clin d’oeil, nous arrivons sous la voix de Silvano, le speaker du Tor des Géants.


Nous pensions possible, sur le papier, de faire cette PTL en 84h, il nous en aura fallu 1 de plus. Pour la première fois, une arrivée de la PTL se fait le jeudi déjà. Cela est aussi en partie grâce aux Trivel, avec qui, nous aurons fait une aventure hors du commun.

enfin… des mercis

  • Merci à la vie de nous offrir de tels moments, j’espère que l’aventure à travers ce sport perdure.
  • Merci aux amis et connaissances venus sur le parcours, à la base vie de Fully ou à l’arrivée à Chamonix. 
  • Merci à Emma et Elena pour leur précieuse aide le long de ce périple.
  • Merci aux gardiens des refuges partenaires pour leur attention, gentillesse, écoute, leurs encouragements et délicieux repas à toute heure de la nuit ou de la journée.
  • Merci aux bénévoles de la PTL qui sans eux cette aventure ne serait pas possible.
  • Merci et bravo à Lionel et Damien, les frangins Trivel pour leur amitié et partage d’aventure.
  • Enfin merci à Candide, co-équipier de tant de courses et d’aventures.
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