La Planète PTL 2021

jh_gabioud • janv. 06, 2022

Départ d’Orsieres, grosse partie valdôtaine, le souvenir de 2019, autant de raisons de se lancer sur cette PTL 2021!

Orsières 8h00, nous piaffons d’impatience sur la place de notre village. Que de souvenirs, que de moments vécus et tellement d'autres à vivre encore. Pas de pression, juste l’envie d’y aller, de s’échapper et de s’y aventurer. C’est pour ce genre d’aventure que l’on s’entraîne et que l’on parcourt la montagne. La famille, les amis, les connaissances sont là et nous profitons de ce vrai moment de foule avant la nature à l’état sauvage.


08h15, c’est parti… Nos jambes, nos têtes et nos cœurs sont prêts pour cette aventure que nous attendons depuis longtemps. La cadence est bonne et nous nous échappons assez vite sur ces sentiers que nous parcourons depuis notre enfance. Dès le départ, nous avons tenté de creuser l’écart, histoire d’ouvrir le chemin pour nous, uniquement. La course est lancée et nous sommes en forme. Nous gardons un bon pas, un peu plus rapide que celui de l’entraînement avec une moyenne de 1000 - 1100 m/h. L’écart se creuse peu à peu et nous grimpons en direction du Six-Blanc. Cette partie hors sentier est parfaitement maîtrisée, puis la crête du Mont-Brûlé est vite avalée jusqu’à la cabane de Mille.


Le brouillard traîne par ici, mais la température est parfaite pour courir. Petit stop à la cabane et en route pour la première grosse difficulté, la montée sur la pointe de Boveire et sa descente. Le GPS est enclenché pour des raisons de sécurité, Candide donne le tempo le long du pierrier. Quelques bénévoles et des photographes sont là et nous permettent de nous repérer dans ce dédale de pierres. Je dois avouer que la reconnaissance faite quelques semaines plus tôt nous aide considérablement. C’est avec satisfaction que nous atteignons le sommet, et nous réalisons qu’un petit écart a été créé ; ce qui nous donne une marge de sécurité le long de la descente en direction des cinq lacs.  Candide galope toujours devant, quant à moi, je lui confirme la direction. Dans la descente, lors d’un rapide coup d’œil en dessus de l’épaule, nous apercevons une équipe sur la crête qui évolue, elle aussi à un rythme intéressant. Il est toutefois important de rester focalisés sur cette descente très technique et ardue. 


Rejoindre le chemin officiel des cinq lacs est un premier soulagement, atteindre la cabane de Brunet en contrebas n’est qu’un détail. Nous poursuivons à bon pas jusqu’à Plamproz puis Fionnay sur une partie assez facile et bien balisée. Arrivés à la hauteur du petit village, nous bifurquons et entamons une magnifique montée vers Sovereu et le Dâ. Tout en essayant de garder un bon rythme, nous réalisons que le premier coup de fatigue se fait ressentir, le rythme doit donc être adapté en conséquence. La course est encore longue…. Le col de Cleuson est atteint sans encombre et encore une fois nous sommes satisfaits d’être passés par là auparavant. Comme quoi, il vaut mieux reconnaître le maximum du tracé au risque d’un peu plus de fatigue.


Prafleuri est en vue et le passage du glacier du Grand Désert est rapidement avalé, avant une partie plus pierreuse jusqu’à la cabane. Nous sommes heureux d’y retrouver quelques bénévoles et les gardiens pour un bon bol de thé et quelques chips grignotées sur le pouce. A ma grande satisfaction, je retrouve Bruno Ringeval, belle rencontre de mes voyages au Népal. Nous nous sentons bien, et surtout, nous ne voulons pas traîner ici afin de passer de jour le Pas de Chèvres, un des passages clé de cette première journée. En alternant marche et course le long du barrage, nous réalisons qu’à priori, personne ne semble être derrière nous. Le soleil nous quitte peu à peu et le lieu est empli de solitude. Il nous faut tenir encore et le délicat pierrier avant le col sera parfaitement maîtrisé.


19:45 : nous franchissons les échelles du Pas de Chèvres et c’est un nouveau soulagement. Il nous reste une belle descente pour Arolla et nous aurons atteint la première base vie. C’est là que nous retrouvons d’abord Laure et Paula qui sont venues nous encourager puis Philippe et sa fille venus nous voir. Après une très courte pause ravitaillement / changement de vêtements, nous reprenons notre chemin pour la première nuit de cette aventure. Nous ne tardons pas, l’objectif est de dormir à Prarayer, de l’autre côté du col Collon. A deux, le temps passe plus vite, nous nous relayons jusqu’au pied du haut glacier d’Arolla pour tenir une bonne cadence. Il fait bien plus frais, le brouillard traîne et nous devons garder toute notre attention pour tenir l’itinéraire et trouver les balises posées par le guide. Le lieu est un peu mystique, c’est un beau passage de haute montagne avec un glacier pas trop compliqué à gérer.


00:00 : nous arrivons déjà au col Collon, nous ne levons pas le pied et continuons pour ne pas prendre froid. En contrebas, des lumières brillent au refuge Nacamuli, mais nous poursuivons notre chemin. Nous nous arrêterons plus bas, une fois cette interminable descente avalée... Un seul mot d’ordre pour cette partie : prudence !


01:30 : nous voilà devant le refuge Prarayer - il est fermé. C'est très angoissant. Soudain, le bénévole PTL surgit pour nous accueillir, nous voilà soulagés. Durant cette courte halte, nous pourrons nous alimenter et nous reposer une petite heure. Et dire que je vais à nouveau passer par là, dans deux semaines, lorsque je participerai au Tor des Glaciers. Mais ça c'est une autre histoire... 


Au réveil, aucune autre équipe ne nous a rejoint, c’est plutôt bon signe... Et maintenant c’est une partie intense qui nous attend jusqu’à Aoste et sa base vie de Saint-Christophe. Il fait sombre et la température n’est pas très clémente. Nous sommes encore un peu endormis. Nous checkons le livetrail et savons, sentons, que nos concurrents tchèques ne sont pas loin après la pause que nous nous sommes accordée. Soudain, nous réalisons qu’ils sont là, pas loin, en face de nous, de l'autre côté du lac à peut-être 1 km à vol d’oiseau. C’est à ce moment que nous nous disons, « maintenant il faut y aller »… Même si nous estimons notre avance à environ 1 heure, ils ne s’arrêteront certainement pas… Nous nous méfions de cette équipe ; ils semblent avoir une grande expérience de raids aventure. Notre avantage principal est notre connaissance parfaite du massif, nous tenons à en tirer profit. 

 Nous franchissons le col de Livourneaz dans la douleur mais sans voir de lumière derrière nous. La deuxième journée est lancée avec un passage rapide au bivouac Reboulaz puis nous poursuivons notre balade en direction du refuge Cuney via les chemins de l’alta via 1, bien connus du Tor. Quel plaisir de retrouver un peu de chaleur et des bénévoles à Cuney pour une petite sieste et un bon repas. La partie jusqu’à la base vie d’Aoste va être terrible avec un enchaînement de 6 cols et une descente de 2200 mètres sur la ville. Reboostés en voyant que les tchèques sont à nouveau 2 heures derrière nous, Candide avance fort et nous tentons de bien gérer ces multiples cols de la Valpelline.

Nous profitons d’une petite pause au bivouac la Liée avant de repartir pour le Mont Mary via le col de Fouillou. Cette partie est très exigeante, sauvage et c’est un soulagement de croiser un bénévole sur le sommet du Mont Mary. Il commence à grêler et ni une ni deux, nous devons filer en entamant cette descente tant redoutée jusqu’à la prochaine base vie. Cette descente est conséquente et très exigeante. Nous devons l’appréhender avec prudence pour sauvegarder nos forces.



St-Christophe, nous voilà !! Après un long détour, nous trouvons enfin le centre sportif où Laure et Paula nous attendent de pied ferme. L'organisation de la base est un peu désordonnée, nous ne savons pas trop que faire ni où aller. Nous devons nous ménager, et après une douche ainsi qu'un repas à la cantine du stade, nous repartirons 50 minutes après être arrivés. 


Le ciel s'assombrit et nous devons traverser la vallée pour atteindre Pollein. Nous poursuivons notre chemin en gardant un bon pas pour grimper, grimper et encore grimper tout là-haut jusqu’à la Pointe Vallette 2600 m au-dessus de nous. Et rien que d’y penser cela est décourageant. Allons déjà à Comboué ! En effet, tentons de penser une étape après l'autre, puis nous rejoindrons le refuge Arbolle. Mais là, le temps se gâte, l’orage se rapproche et nous sommes relativement contents d’être en forêt et bas en altitude. Comme prévu, la montée est interminable. Candide ayant reconnu le tracé m’aide et me conseille ! Plus haut, nous atteignons l’alpage de Comboué et quelques chiens dérangés par notre passage hurlent. Effrayés pas ces aboiements, nous pressons le pas et poursuivons notre chemin pour atteindre le refuge Arbolle avant la nuit. L’arrivée au refuge se fera à la tombée de la nuit pour un repos mérité. Plus tard, nous enfilerons baudriers et casques… puis reprendrons la route en direction de la pointe Vallette et sa via ferrata que nous emprunterons en descente et dans le noir. 

Candide ouvre le chemin à travers le brouillard, il me guide parfaitement sur ce secteur de crête où le sentier est peu présent. La croix de fer nous signale le sommet et aussi le début d’une partie technique. Par sécurité, nous nous longeons car aucun faux pas n’est permis ici. Ce secteur sera rapidement avalé et une immense descente jusqu’à Epinel nous attend à travers les alpages. 


Epinel, quel magnifique petit hameau de la vallée de Cogne. Au milieu de la nuit, un petit banc nous suffira pour 3 minutes de sommeil. Il faut encore se relever et continuer pour une nouvelle partie clé jusqu’à Degioz avec les immenses cols de Trajo et Belleface. Quel concentré de difficultés cette PTL 2021!


C’est long, très long et la fatigue se fait sentir à mesure que nous prenons de la hauteur.


Le col de Trajot est interminable et au beau milieu de la nuit les points de repères sont peu nombreux. Il en faut du courage ! La pente est raide et, aux forceps nous arrivons au col. C’est dur et à nouveau le brouillard est présent dans cette zone. Nous devons rester attentifs. Par mesure de sécurité, je sors, pour la deuxième fois le GPS, mais ce dont nous avons vraiment besoin c’est d’une micro sieste de 5 minutes. 


Le col de Belleface est tel un mur qui se dresse en face de nous, ça à l'air infranchissable. Mais heureusement, le jour se lève et une énergie nouvelle surgit avec le soleil. La deuxième nuit de cette PTL est enfin derrière nous. Le col est lunaire et le chemin quasi inexistant, nous sommes comme, ailleurs, avec ce magnifique lever de soleil à l’horizon. Cela ressemble un peu à un envoutement après une nuit plutôt brutale. Et maintenant, un beau plongeon doit nous mener à Degioz… Sur le chemin de la descente, l’organisation nous prévient que la base vie n’est pas encore prête, et ceci est un gros coup de stress, car nous avons vraiment besoin de prendre soin de nous. Nos fidèles ravitailleuses devront donc trouver une solution pour que nous puissions nous reposer, nous alimenter, nous sécher, nous changer et ceci sans perdre trop de temps. Plus tard, c’est avec plaisir que nous rencontrons notre team ravitaillement satisfait d’avoir trouvé la solution très appréciée et vraiment top au vu des circonstances. Ce n'est qu'en partant que l'on croise les bénévoles PTL qui viennent préparer la base vie... "Nous avons de l'avance et nous en sommes désolés !" Mais il est temps pour nous de repartir pour la suite...


La journée est belle et nous repartons bien boostés de Degioz sur les anciens sentiers du Roi de Savoie. Cela fait du bien de retrouver plus de traversée et du terrain moins raide après tant de verticalité. Nous grimpons plein d’entrain et de motivation car tout va bien. Orvieille et Djouan se présentent avant un bon coup de barre au lac ! Hop ! 5 minutes de sieste au bord du lac et le col Manteau est vite atteint. Il faut tenir, toujours tenir, passer plan Borgnoz et grimper ce fameux Taou Blanc à presque 3500 mètres. C’est un nouveau passage clé et nous sommes satisfaits d’y passer de jour car le terrain est équipé mais exigeant. Corrado, le guide PTL a préparé cela en ordre et le passage sur le glacier est grandement facilité avec nos petits crampons. A l’entraînement, le passage était limite avec des chutes de pierres, mais aujourd’hui tout se passe très bien dans un sentiment de sécurité et nous remercions les bénévoles… Nous voici au point le plus haut de cette PTL. C’est magique et quelle chance d’être là, encore loin du Mont-Blanc… Mais nous nous y rapprochons petit à petit.


Nous démarrons la descente et perdons assez rapidement de l’altitude, puis retrouvons le refuge Bénévolo, havre de paix au fond du Val de Rhêmes. Les gardiens sont magnifiques et l’accueil est à la hauteur des refuges italiens. Le repas est excellent, à la hauteur de l’accueil.  Candide me sort de mon sommeil et nous repartons de jour en direction du col Bassac pour basculer sur le refuge Bezzi. Le rythme est régulier et le col est atteint sans trop de difficultés en ce début de nuit. Notre avance commence à devenir confortable et cela nous permet de gérer l’effort à notre guise. Qu'elle est longue cette descente, elle est même interminable surtout de nuit, et le refuge Bezzi est compliqué à distinguer dans le noir. Nous devinons une petite lumière au loin et nous nous demandons si c’est bien une lumière du refuge. Affirmatif... La porte du refuge est ouverte mais à 23 heures plus personne n’est présent. Une soupe et du thé sont déposés pour nous. S'en suivent 7 kilomètres de course à pied sur une route qui nous amènera au pied de la prochaine montée. A moitié endormi, dans la nuit sombre et mystérieuse, je réalise qu’il reste encore bien des cols à franchir et du chemin à parcourir.


Arrivés à Uselieres, nous avons rêvé d’un petit break à l’hôtel Giasson… Mais notre arrivée trop tardive nous en a empêché. Nous nous contenterons de 3 minutes de pause sur le parking. Un vent frais souffle en direction du lac Saint Grat. La fatigue, elle, se fait ressentir. Impossible de se poser sur le sentier et nous devons poursuivre jusqu’à la petite cabane adjacente au lac afin de trouver un abri. Au lac une surprise de taille nous attend !!! L’abri repéré quelques semaines plus tôt est chiuso. Nous n’avons pas d’autre solution que de sortir nos couvertures de survie. Le froid, à ce moment, est glacial. Nous sommes habillés mais le vent, l’altitude, la nuit nous glacent la peau. Le moment est ultra compliqué, et nous nous trouvons dans un état à la limite de la lucidité. Quelques minutes de sommeil nous sont primordiales, mais dans ces conditions, nous devons faire très attention. Pour nous, il est impossible de trouver une position pour dormir. S’accrocher, résister sont les seules voies à suivre et surtout poursuivre pour ne pas être défaits par ce vent qui nous transperce. 


Nous sommes dans la montée du col de la Sassière, il n’y a pas de sentier et la pente est très raide avant d’atteindre le restant du glacier. Il faut tenir au courage, au mental… Arrivés au col, nous ne perdons pas une seconde avant de redescendre. Notre priorité est d’atteindre le plus vite possible le refuge du Ruitor. Comme souvent dans une PTL, la descente est mauvaise et le terrain est très exigeant. Avec ce brouillard serré les conditions sont de plus en plus compliquées. Nous ne pouvons pas nous arrêter avant le refuge. Les sensations sont si particulières ici avec la rosée déposée sur l’herbe offrant une drôle de couleur blanche à la vue de nos frontales. Après une lutte acharnée contre le sommeil, Candide et moi atteignons enfin le refuge tant bien que mal. Nous sommes raides ! Nous pouvons enfin nous abriter dans un coin du réfectoire.


Il doit être vers 6:15-6:30 lorsque le gardien nous retrouve. Il nous prépare un bon petit déjeuner et avec le levé du jour, nous sommes bien requinqués pour affronter la zone du Petit Saint-Bernard.Le plus dur est passé ! C’est incroyable de voir comment le corps réagit après un moment de crise. Il est temps de continuer notre route vers le col Tachuy. A ce moment, nous sommes à nouveau parfaitement lucides et aptes à nous faufiler dans cette partie bien casse-pattes qui nous emmène jusqu’à l’hospice. Grâce à notre reconnaissance, notre allure reste fluide et la montée au Mont Valezan nous offre un panorama fantastique que seule la PTL peut t’offrir. C'est Grandiose! Le tracé en crête suit l’ancienne ligne militaire et c’est incroyable de constater tout ce qui a été construit durant la guerre. Mais nous n’avons pas le temps de traîner pour l’historique, l’hospice nous attend en contrebas. Quelle satisfaction d’y arriver, de revoir Laure et Paula tout sourire. La base n’est pas tout à fait prête pour nous accueillir. Après 15 minutes d’attente sur place, à tourner en rond, nous laissons nos sacs d'allègement et filons dans un bar côté italien pour déguster un bon plat de pâtes. Laure et Paula nous donnent un bon coup de pouce pour nous changer, nous ravitailler… Pour avancer de jour, nous ne trainons pas trop. Nous n’avançons pas après pas vers le Mont-Blanc, nous avons bon moral et notre condition physique est plutôt pas mal. Ce parcours extra exigeant mais aussi extraordinaire nous permet de découvrir tant de paysages majestueux. Le massif est magnifique depuis ici… et les montagnes que nous aimons tant sont toujours aussi féériques. 


Le sentier pour Bassa Serra est agréable et qu’il est bon de croiser du monde dans ce lieu si authentique et sauvage. Nous en prenons bien les yeux !!! Toutefois, notre côté montagnard nous rappelle que nous devons rester attentifs – les cordes installées dans la muraille nous aide bien et nous atteignons rapidement le col de Chavanne. Le vent s’est levé, après quelques mots échangés avec des bénévoles, nous allons poursuivre, avec l’objectif d’arriver de jour au refuge Robert Blanc.


Au col de la Seigne, le vent souffle fort, nous nous pressons donc et continuons sur cette longue, très longue partie en traversée jusqu’au refuge Robert Blanc.  Candide lit parfaitement l’itinéraire pour nous conduire, juste avant la nuit, au dernier refuge partenaire. C’est parfait, accueil magnifique, bénévoles au top, repas succulent, le repos est confortable… L’écart est creusé, et nous sommes heureux de pouvoir bénéficier d’une météo plus clémente pour les prochains kilomètres à parcourir.  Je pense que j’ai dû avaler en tout cas 400 grammes de pâtes tellement c’était bon. Candide et moi réalisons que nous ne sommes plus qu’à quelques encablures de Chamonix. Si tout va bien, nous allons clore cette aventure et en beauté ! Candide, bon calculateur, vise un finish vers 12 heures le lendemain. Nous pouvons donc envisager notre première longue sieste, après près de 90 heures d’effort intense.

02:30 : Candide me sort de mon sommeil et je suis ailleurs ! Nous profitons de prendre un bon thé chaud et nous nous relevons, pour une ultime journée. Si tout va bien, notre prochaine pause sera à Chamonix… Le vent est tombé, la température est acceptable, nous quittons alors le refuge pour remonter à la Grande Ecaille et atteindre le col d’Enclave. La descente va être sport car le terrain est technique à souhait et le sentier est réputé pour être mauvais. Nous assurons nos pas à travers le brouillard ; c’est le dernier spot engagé de cette PTL. Nous voyons l’alpage de la Balme, encore endormi à 5 heure du matin. A ce moment, je ressens un léger coup de barre, je dois me battre contre mes paupières devenues très lourdes. Puis, je perçois une petite lumière à Nant Borrant et nous tombons, avec plaisir, sur Patricia la gardienne qui nous accueille à bras ouverts pour un excellent petit-déjeuner.


Le long du val Montjoie, nous calons un peu. A ce moment, Nicolas du PC course nous contacte par téléphone… Cela nous donne un bon coup de fouet… Le jour se lève et notre énergie, elle aussi s’accroît… Nous accélérons, oui nous accélérons au kilomètre 280. Un nouveau regain d’énergie nous fait grimper à 900 m/h, c’est enivrant !

Chalet du Truc, chalet de Miage, plus rien ne peut nous arrêter et nos pauses sont limitées au minimum. Le col Tricot n'est qu'une formalité à ce moment-là de la course. Chamonix se fait fortement ressentir. 


A Bellevue, nous nous changeons une dernière fois. A cet endroit, mon genou commence à me faire souffrir, quelle poisse ! La douleur est gérable. Je garde espoir que cette sensation ne s’empirera pas d’ici la ligne d’arrivée qui n’est plus très loin. Par des mouvements souples et fluides, je tente de gérer cette douleur tant bien que mal. Le village des Houches se présente rapidement. Nous sommes heureux de rencontrer des connaissances.

Il nous reste encore quelques 8 kilomètres à parcourir sur ce tracé… J’ai l’impression que des ailes ont poussé dans le dos de Candide, il me motive à courir et relancer… la magie opère… 


Peu avant Chamonix, Marc, un client, nous accompagne sur quelques mètres… des runners font demi-tour et nous suivent en constatant que nous faisons partie des concurrents PTL… 


Les Gaillands sont bien passés, le dernier moment de calme avant la dernière ligne droite. Il y a comme une étincelle dans l’air… nous entendons crier à gauche à droite, les applaudissements se font de plus en plus imposants… Le public, ah le public, il est chaud… Quelle sensation particulière d’entrer dans Chamonix dans cette ambiance. 

Nous venons de parcourir 299 kilomètres dans des terrains hostiles, en rencontrant uniquement quelques personnes, seuls en montagne… Cette clameur, ces spectateurs nous donnes des frissons dans tout le corps. Nous volons vers la ligne d’arrivée.


Et voici, déjà, le dernier virage avant cette ligne d’arrivée, avant d’apercevoir cette église tant rêvée, au beau milieu de ces acclamations, flash-back souvenirs des difficultés rencontrées durant ce périple, ces émotions intenses déjà vécues et ces nouvelles émotions qui surgissent… c’est de la folie, c’est indescriptible ! 

Nous l’avons fait. C’était dur, mais nous y sommes… Bonjour Chamonix et merci ! Il est 12 h 48, Candide et moi sommes dans les temps – nous sommes heureux. Il nous aura fallu 100 heures 38 minutes pour joindre Orsières à Chamonix, sur un tracé audacieux, merveilleux, un parcours concentré de difficultés – probablement une des PTL les plus dures, mais sans doute une des plus belles. 


Nous débarquons d’une autre planète… la planète PTL.


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